« La simple détention des clés d’un bien indivis par un seul des indivisaires permet de caractériser une jouissance privative et exclusive donnant lieu à une indemnité d’occupation. »
Par cet arrêt, la Cour de cassation revient sur le champ d’application de la règle bien connue figurant à l’alinéa 2 de l’article 815-9 du Code civil, selon laquelle l’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité d’occupation. La Cour rappelle sa définition de la jouissance privative et réaffirme, dans le prolongement de ses précédentes décisions (v. en ce sens Cass. 1re civ., 31 mars 2016, n° 15-10748 ; Cass. 1re civ., 22 juin 2016, n° 15-20766 ; Cass. 1re civ., 30 juin 2004, n° 02-20085), que la détention des clés d’un bien indivis par un unique indivisaire, sans que celui-ci n’occupe nécessairement ledit bien, caractérise une telle jouissance.
En l’espèce, pour rejeter la demande en paiement d’une indemnité d’occupation formulée par l’un des coïndivisaires concernant une maison d’habitation indivise, la cour d’appel avait retenu que l’absence de relocation du bien indivis, après le congé notifié par le locataire, n’impliquait pas que l’autre coïndivisaire ait fait un usage privatif des lieux. Selon les juges du fond, ce dernier ne pouvait donc pas être redevable d’une indemnité d’occupation au seul motif que les clés avaient été restituées, à lui seul, par l’ancien locataire.
La Cour de cassation, au visa de l’article 815-9 du Code civil, casse sans surprise l’arrêt rendu par la cour d’appel en rappelant que :
– la jouissance privative d’un immeuble indivis résulte de l’impossibilité de droit ou de fait, pour les coïndivisaires, d’user de la chose ;
– la détention des clés d’un bien indivis par un unique indivisaire, en ce qu’elle permet à ce dernier d’avoir, seul, la libre disposition d’un bien indivis, est constitutive d’une jouissance privative et exclusive entraînant la redevabilité d’une indemnité d’occupation, peu important que cet indivisaire occupe effectivement ou non ledit bien.
Cass. 1re civ., 20 sept. 2023, no 21-23877, M. H. c/ Mme H. épouse C., F-D (cassation partielle CA Nîmes, 5 août 2021), Mme Auroy, f. f. prés. ; Me Occhipinti, SAS Buk Lament-Robillot,