Présomption de faute inexcusable au bénéfice du salarié intérimaire en l’absence de formation renforcée à la sécurité
La présomption de faute inexcusable de l’employeur au bénéfice du salarié intérimaire victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’il est affecté à un poste de travail présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité, ne peut être renversée que par la preuve que le premier a dispensé au second une formation renforcée à la sécurité.
C’est ce qu’a décidé la Cour de cassation dans un arrêt du 11 octobre 2018 . En l’espèce, une salariée d’une entreprise de travail temporaire avait été victime d’un accident du travail alors qu’elle effectuait une mission au sein d’une société qui recourait à ses services. Elle avait saisi une juridiction de sécurité sociale en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur. Condamnée à garantir la société d’intérim des conséquences financière de la faute inexcusable mises à sa charge, l’entreprise utilisatrice avait décidé de se pourvoir en cassation. Mais elle a essuyé un nouvel échec.
Le principe a été posé par la Cour que « la présomption de faute inexcusable instituée par l’article L. 4154-3 du Code du travail ne peut être renversée que par la preuve que l’employeur a dispensé au salarié la formation renforcée à la sécurité prévue par l’article L. 4154-2 du même code ». Elle a approuvé les juges d’avoir retenu que la présomption de faute inexcusable n’était pas renversée et que la survenance de l’accident était entièrement imputable à la faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice. Les magistrats avaient constaté que la salariée temporaire, amenée à manipuler des instruments tranchants, était affectée à un poste de travail présentant des risques particuliers pour sa santé et sa sécurité. Devait en conséquence lui être délivrée une formation renforcée à la sécurité. L’entreprise au sein de laquelle elle avait été mise à disposition avait bien essayé de se défendre en faisant valoir qu’elle avait institutionnalisé un système de remplacement automatique sur simple demande du salarié des couteaux usés, qu’elle avait remplacé les couteaux à neuf 4 jours avant l’accident, ce qui était conforté par deux attestations, et qu’elle mettait à disposition de chaque employé des gants de protection anti-coupure et anti-piqûre dont l’usage leur avait été expliqué. Insuffisant pour les juges dès lors que la société ne justifie pas avoir dispensée à la salariée intérimaire une formation à la sécurité au sens de l’article L. 4154-2 du Code du travail (Rapp. Cass. soc., 27 juin 2002, n° 00-14.744 : JurisData n° 2002-014991 ).
Ainsi donc, prendre, comme dans l’affaire jugée, des mesures pour préserver le salarié des risques auxquels il est exposé ne saurait suffire. La faute inexcusable de l’employeur est présumée établie pour le salarié temporaire victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’affecté à un poste de travail présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité il n’a pas bénéficié d’une formation à la sécurité renforcée. Bien que pouvant apparaitre sévère pour les employeurs, la solution rendue est conforme à l’article L. 4154-3.
L’on n’indiquera que si l’entreprise de travail temporaire, employeur, est effectivement la seule tenue envers les organismes de sécurité sociale des conséquences financières en cas d’accident du travail, elle dispose d’une action en garantie contre l’entreprise utilisatrice lorsque celle-ci a commis une faute inexcusable, ce qui était le cas en l’espèce ( Cass. soc., 4 févr. 2010, n° 08-10.520 , inédit : JurisData n° 2010-051601 ).
Source
Cass. 2e civ., 11 oct. 2018, n° 17-23.694, F-P+B
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